Trois en deux... Voyage collé-serré

Le fait qu'Ujiro écarte Yukari d'elle avait mit la puce à l'oreille de Yukô. Mais elle n'avait pas râlé. Trop obnubilé par la perspective des risques éventuels encouru par Yuki. Même si Yuna avait agité la tête avec nervosité, elle s'était contenté de pousser un soupir lourd et de presser la poignée à gaz. Dans le pire des cas, elle comptait sur Yukari pour empêcher l'Homme à huit mains de trop l'empêcher de conduire.

Ca faisait à peine un quart d'heure qu'ils avaient tous quitté Kumai Seta et déjà ils étaient au centre d'un néant blanc. Pas de port derrière pas de capitale devant. Perdus au milieu de nulle part, sur un scoot qui avançait en ligne droite.

Yukari était ravie. Elle allait faire d'une pierre deux coups. Bricoler utile et bricoler plaisir. C'était marrant que ce soit à elle qu'on fasse appel pour sauver Yuki. Qu'est-ce qu'elle pourrait bien faire à l'autre tas de Chii-Kan, sérieusement ? Elle serait jamais assez rapide... Pfff... Tant pis, au pire, elle comptait sur les Guneuses.
La fillette resserra son étreinte autour de la taille de Ujiro. En tout cas, elle avait trouvé un pote. Merede, ce type allait lui montrer le secret de la régénération comme on passait une recette d'oeuf à la coque ! Il était trop fort, ce mec !

Les bras de Yukari autour de sa taille étaient bien gentils, mais pas vraiment suffisants pour assouvir les bas instincts de Ujiro. Aussi, conformément à ses prédictions, il se laissa négligemment aller à poser ses mains avec douceur sur l'oppulente poitrine de Yuko...

Mais c'est sans douceur aucune que le coude de Yukô alla se ficher dans les côtes d'Ujiro. Si elle n'était pas aussi rancunière que sa soeur aînée, elle n'en demeurait pas moins très impulsive. Ujiro cambra sous le choc et eut un sourire.
Yukari resserra son étreinte.

"Arrête de gigoter, Ujiro-sempaï ! On va chavirer !"

Elle lui asséna une petite claque à l'arrière du crâne.

Yukô amorça un virage dérapé. Ils arriveraient à Tôkyô dans un quart d'heure environ. En théorie du moins. Elle avait vu quelqu'un traverser "Dis-donc, ma vieille ! T'es siphonée ? Je te signale que je saigne, à cause de toi..."juste devant le véhicule. Merde. La silhouette, elle la connaissait pas. Ca avait l'air d'être une femme. Kikon Seija ? Mieux valait espérer que non. Ils tenaient déjà Yuki, pas besoin d'en rajouter.
Elle se prit à penser à Shiro et secoua la tête. Mais non, débile, arrête. Tout va bien pour lui.

La silhouette repassa.

Yukô enjamba le scoot en dégainant. Elle n'avait qu'à bien se tenir, la morue qui l'empêchait d'aller sauver sa soeur. Nouveau mouvement. Yukô appuya sur la détente et déclencha une rafale de balles enc ercle autour d'elle. Ujiro et Yukari se baissèrent pour l'éviter.

"Sors de ta cachette ! Montre toi, si t'es une femme !"

La silhouette reparut de derrière une dunette. Elle saignait.

"Dis-donc, ma vieille ça va pas ? T'es siphonée ! Je saigne à cause de toi..."

La jeune fille se tenait le bras. La balle s'était logée dans l'épaule. Le sang dégoulinait sur son T-shirt blanc étriqué autour de sa silhouette avantageuse. Son mini-short déjà rouge à la base laissait entrevoir un mince filet de chair avant le début à la mi-cuisse d'énormes bottes qui faisaient gagner à la jeune fille dix bon centimètres. Elle portait sur le front d'imposantes lunettes et un bonnet recouvrait ses cheveux d'ébène. Joli brin de fille, qui pissait rouge du bras.

"Michiru ?

-Bin oui. Qui veux-tu que ce soit ?" soupira-t-elle.

Yukô soupira à son tour. Comme si ils avaient besoin de ça... La meilleure amie de Yuki. Une Miséreuse débile adepte de mécanique, et hacker par dessus le marché.

Michiru s'avança vers le scoot. Elle passa un doigt dessus amoureusement.

"J'adore ces machines... C'est vraiment... Hey, Yukari-chan ! Il est pas un peu vieux pour toi, ton copain ?"

Michiru eut un sourire chafouin. Sa besace commença à frétiller. Elle l'ouvrit d'un geste vif et attrappa Hakao. Hakao était un petit animal plutôt du genre indéterminé, baptisé comme ça à cause de son aliment préféré (le hakao est un ravioli de crevette chinois). Le petit animal bondit sur Ujiro et se logea sur son épaule.

Ujiro attrapa la bestiole entre ses deux doigts et la regarda avec curiosité.

"Il est comestible ?"

Puis il le lança doucement dans la neige devant sa propriétaire avec une sorte de négigent dédain.

"C'est que j'ai moi même une chimère, très fatigante a nourir."

Il se passa la main sur le menton.

"Tiens ça me fait penser que j'aurais du demander à Heizo de me mettre Lapinou de côté..."

Il laissa sa jambe gauche tomber dans la neige.

"Bon, qu'est-ce qu'on fout là ? J'avais cru comprendre qu'on était pressés..."

Michiru haussa un sourcil.

"Pressés ? Pressés pour quoi ? Shimitsu veut encore des tartines ?"

La jeune fille pouffa de rire à sa propre blague. Elle fut la seule. Yukô poussa un nouveau soupir bruyant.

"Non, Michiru. C'est pas lui qui a besoin d'aide. Laisse nous y aller, s'il te plait."

Yukô savait pertinnement que si Michiru apprennait que Yuki avait des problèmes, elle se jeterai sur le scoot et remuerait ciel et terre pour les accompagner.
Donc, mieux valait qu'elle ne le sache pas, ils étaient assez serrés sur cet engin.

"Ah bon. C'est qui alors ? Vous êtes tellement nombreux, vous !"

"C'est personne. On doit y aller. Ciao."

Yukô secoua la tête avec dédain et remonta sur le scoot. Elle attrappa Hakao entre deux doigts et le lança à sa maîtresse.

"Surveille ta bestiole, s'il te plait"

"Ouais, désolée. Enfin... Vous me plantez comme ça ? Ramenez moi en ville, au moins ! C'est loin, à pied !"

Sans attendre la réponse de Yukô, qu'elle aurait su négative d'emblée, Michiru monta sur le scoot. Pour éviter d'être trop serrés, elle resta debout sur les tiges de métal qui sortaient au milieu des roues. Pas très confortable, mais plutôt marrant.

"Dis-donc, vous êtes pressés pour quoi ?" demanda-t-elle à l'oreille à Yukari.

La petite fille ne connaissait pas très bien Michiru, ni ce qui pouvait bien l'unir à Yuki. Et en plus, elle était polie...

"Yuki a des problèmes et..."
Michiru était déjà assise sur les genoux d'Ujiro, en train d'asséner une grande claque à l'arrière du crâne de Yuko.

"T'aurais pas pu me le dire ? Yuki a des emmerdes et tu me le dis pas ! Merde Yukô, tu crains ! Enfonce moi cette pédale à la con, accélère ! Si on lui a fait du mal, je veillerai personnellement à t'enfoncer mon poing dans la hurre, idiote ! Incompétente ! Et c'est toi que Shimitsu envoie ! Il a pas plus de jugeote !"

Yukô supportait le tout sans broncher. Avec difficulté, ok, mais sans broncher. Toute sa vie on lui avait répété qu'elle était incompétente. Jusqu'à ce qu'elle fasse équipe avec Yuki. La jeune fille avait plus d'importance que la prunelle de ses yeux. Et Michiru semblait croire qu'elle était la seule pour qui Yuki comptait...

"Ta gueule..." se contenta-t-elle de dire avec froideur.

Ujiro commençait a être un peu à l'étroit. Entre les seins surdéveloppés d'une gamine de treize ans et le fessier magnifiquement rebondi d'une inconnue dont il saisissait mal ce qu'elle foutait là mais dont il saisissait très bien la cuisse droite sous prétexte de s'accrocher, tout en fumant négigemment de la main gauche pour tenter d'oublier que les voyages l'avaient toujours profondément gonflé.

Bon c'était bien gentil tout ça, mais quand est-ce que baston ? Ujiro songeait qu'après avoir collé sa dérouillée au Buffle il était à peine chaud, et que ça serait dommage de pas en profiter. Il en venait à espérer qu'il allait se passer quelque chose, il visualisait des hordes d'adversaires dignes de ce nom, avec toutes sortes d'armes, qui jailliraient devant eux, en motos aussi, pour que le combat prenne la dimmension palpitante de la vitesse. Il se voyait déjà trancher dans le vif des sujets du président, et loger balle sur balle dans des crânes à peine trop lents pour les éviter. Il se voyait bondir sur la bécane de celui qui serait leur patron, le Dragon peut-être, ou au moins Snake, et le duel épique à deux cent à l'heure, debouts sur le véhicule qui roulerait encore. Et à la fin, dans une parade épique il parviendrait à vaincre. Il visualisait tous les muscles de son bras qui se tendraient au même moment, et son regard précis, et le canon de son arme, aligné à l'endroit précis ou arrive la tête du Serpent, et le coup qui part, la balle qui perfore l'oeil, le sang qui gicle, le vent qui fouette ses longs cheveux, puis d'un négligent revers il décapite le type qui pilotait le véhicule, puis prendre sa place et adresser un clin d'oeil aux filles sur le scoot. Aaaaaaah... Le pied total.

Puis il revint à la réalité et laissa s'envoler son mégot. Puis il évacua un très profond et très long soupir. Quand est-ce que bastoooooooon ?

Michiru ne fit pas la mouche quand Ujiro s'accrocha à sa cuisse. Pfff... Elle avait l'habitude, maintenant. Son léger soupir amusé ne s'entendit même pas avec le vent dû à la vitesse.

Puis frein. Dérapage. Tirs. Neige. Sang. Fumée.

Une paire de bras puissants saisirent Yukô aux épaules. D'un mouvement leste, elle tourna la tête pour découvrir un triste spectacle. Sur fond de murs de Tokyô, Yukari, Michiru et Ujiro étaient enserrés dans des poignes similaires. Plus costaudes pour l'homme. Merde. Si près du but... Et Yuki qui était prisonnière avec Chii-Kan depuis tout ce temps. Merde.

Elle décocha un grand coup de pied latéral dans la mâchoire de l'homme qui maintenait Ujiro et sentit une aiguille s'enfoncer sous sa peau. Se spaupières se mirent à papilloner.

"Ujiro, merde, Yukari te fait confiance, je compte sur toi"

Yukô sombra dans un profond sommeil.

"Vous me faîtes un peu mal, vous savez ?"

Michiru tentait fébrilement de faire passer ses doigts sous l'énorme paluche du type qui la maintenait. Pour se libérer ? Non. Parce que la sueur des paumes du type la démangeait. Au contraire, c'était plutôt un bon plan pour recueillir des infos, ce kidnapping. On est hacker ou on l'est pas.

"Bouge ta pogne, sanglier, ça me gratte !"

Michiru attrappa rapidement un coutelas dans son étui et le planta profondément dans la main de son agresseur. Une aiguille passa également sous sa peau et elle s'endormit presque aussitôt.

"Ujirhm hmm"

Yukari était retenu d'un seul bras, une main plaquée sur la bouche. Elle tentait de sétirer de partout pour échapper au contrôle de l'homme qui approchait maintenant une aiguille de son coup surtendu.

Ujiro frémit d'aise. Il enfonça discrètement ses longs doitgts profondément dans les viscères du type qui le tenait. L'air de rien, comme ça, ses doigts avaient perforé la peau et s'étaient frayé un chemin parmi les muscles. En évitant les nerfs. L'autre ne sentait même pas la douleur. Pus Ujiro tira d'un coup sec, et la moitié des organes du type jaillirent dans un hurlement effroyable et une gerbe de sang. Celui qui tenait Yukari s'écarta un peu, les deux autres se ruèrent vers lui. Avant même qu'ils n'aient atteint sa position, Ujiro était déjà derrière eux et ses balles volaient vers leur destination. Il se retourna vers le dernier, arme pointée vers le milieu de son front, si tôt qu'il eut entendu les deux shplorf rassurants qui signifiaient que ses balles avaient atteint leur but et que les deux autres causaient en tête à tête avec dieu.

"Alors minable, tu vas me dire bien sagement ce que vous voulez, et peut-être que je serai gentil avec toi."

L'autre tremblait, il ne savait pas quoi faire, il ne lâchait pas la gosse, sa main tremblait au dessus du holster qu'il avait à la cuisse.

"Abruti, tu crois vraiment que tu es capable de dégainer avant que je te plombe ?"

Le type n'en pouvait plus, il lança Yukari vers Ujiro, droit sur l'arme et fit volte face. Ujiro rira. La balle traversa la cascade de cheveux d'argent sans toucher Yukari et se ficha dans l'épaule du type, le clouant au sol.
Une fraction de seconde plus tard, Ujiro réceptionnait Yukari et la posait délicatement dans la neige, et une autre fraction de seconde plus tard, les lames qui garnissaient la gueule de son arme se plantaient peu profondément dans la nuque de l'homme.

"Imbécile... C'est pourtant pas faute de t'avoir prévenu... Alors maintenant tu vas bien gentiment me dire tout ce que je veux savoir, d'acoord ? Vous êtes qui vous voulez quoi ?"

"Je... Je te dirai rien..."

Ujiro se caressa pensivement le menton.

"En effet, c'est aussi ce que je crois."

Il enfonça les lames de tout leur long dans la nuque de l'homme, le souleva au bout de son flingue et le lança plus loin en tirant une balle à travers sa gorge, qui s'ouvrit comme un papillon ensanglanté.

Yukari n'avait pas vraiment vécu la scène. A vrai dire, elle n'avait pas vraiment eu le temps de réaliser. L'aiguille s'était approché de son cou, puis l'homme était mort. Il s'était sûrement passé des trucs avant qu'elle ne se retrouve dans les bras d'Ujiro, mais elle ne savait pas du tout quoi. Les hommes étaient tous morts. Baignant dans une marre de viscères et de sang. Le visage de la jeune fille se crispa.

Elle eut un haut-le-coeur.

Yukari détourna le regard et tomba sur les deux corps enchevêtrés de Yukô et Michiru. Ses yeux se mouillèrent de larmes. Sa gorge se serra. Puis elle ravala tout ça, non sans difficulté, certes, mais avec un applomb inhabituel pour une fillette de cet âge-là.

"Ujiro-sama, que c'est-il passé ? C'est quoi ce délire ? J'ai rien vu... Pourquoi ce type... Ta main... Ce..."

Sa voix se cassa. Merde. Un type aussi gentil...

Ujiro regarda la gamine. Merde. A vrai dire il avait espéré que les types l'aient déjà endormi en fait, et qu'elle n'ait pas assisté à la scène.

"T'en fais pas pour ma main princesse, c'est pas le mien ce sang."

Il se pencha sur les filles et posa la main sur leurs cous.

"Et t'en fais pas non plus pour tes soeurs, elles font juste un somme."

Il regarda le skoot. En posant les pionceuses entre lui et Yukari ça devait être gérable.

"Allez princesse, tu me files un coup de main ?"

Il souleva Yukô sans avoir l'air de fournir le moindre effort, ce qui était surprenant vu sa carure. Il la posa simplement sur le skoot, et vint préter main forte a Yukari pour porter Michiru, avant de la poser sur le dos de Yukô. Puis il souleva Yukari et la posa sur le skoot. Il posa un goigt sur son nez et passa rapidement la main dans ses cheveux avec un gentil sourire. La main propre évidemment, rhoo.
Puis il enfourcha le véhicule et s'enfonça dans Tokyo, pleins tubes.